en , Enrico Fermi arrive au laboratoire de la bombe atomique de Los Alamos, avec son collègue Leó Szilárd.
Franc partisan de l'existence de civilisations extraterrestres, Fermi se trouve confronté à la frustration du manque
de signes de leur existence. En suivant le raisonnement selon lequel des civilisations devraient aujourd'hui s'être
répandues dans la galaxie, il descend déjeûner un après-midi à Los Alamos et pose sa fameuse question : S'ils sont partout, où sont-ils ? Pourquoi n'avons-nous trouvé aucune trace de vie
extraterrestre intelligente ? Szilárd, chercheur d'origine hongroise, répond alors avec humour que peut-être ils
sont parmis nous, mais se font appeler Hongrois. Dans son livre The curve of binding energys11973, Farrar, Straus et Giroux, pp. 104-105, John McPhee raconte :
Toutes les théories de Los Alamos ne purent être testées. Une longtemps populaire dans la Division Théorique fut,
par exemple, que les Hongrois étaient des Martiens. Le raisonnement était le suivant : les Martiens ont laissé leur
planète il y a des éons et sont venus sur Terre ; ils ont atterri dans ce qui est aujourd'hui la Hongrie ; cependant
les tribus d'Europe étaient tellement primitives et barbares que les Martiens durent dissimuler leurs différences
d'évolution pour éviter d'être coupés en morceaux. Au fil des années, cette dissimulation finit par être
quasi-totale, mais les martiens avaient 3 caractéristiques trop difficiles à dissimuler : leur passion des voyages,
qui déboucha sur les bohémiens Hongrois; leur langue (le Hongrois n'a aucun lien avec les langues parlées dans les
pays voisins), et leur intelligence provenant d'un autre monde. Il fallait regarder alentour pour se rendre à
l'évidence : Edward Teller, Wigner, Szilárd, John VonNeumann
— tous étaient Hongrois. Wigner avaient conçu les premiers réacteurs à production de plutonium. Szilard avait été
parmi les premiers à suggérer que la fission pouvait être utilisée pour fabriquer une bombe. VonNeumann avait
développé l'ordinateur numérique. Teller — au caractère trempé et infatigable (...) — travailla durant de longues
heures et piaffa d'impatience lorsqu'il ressentit un avancement trop lent du projet Panda, lorsque la bombe à
hydrogène fut connue... Teller avait un accent Martien à couper au couteau. Il avait également un sens de l'humour
qui pouvait pénétrer les os.
Peut-être donc que Szilárd essayait de mettre son collègue d'origine italienne dans la confidence :) Lorsque l'on
rappelle à Teller la réponse de Szilárd à Fermi, et répond avec ferveur Non ! Nous sommes des Martiens !s2SETI.
Réponses
Plus sérieusement, plusieurs explications ont été proposées au paradoxe de Fermi, notamment :
Il n'existe pas de civilisations extraterrestres viables à contacter, du moins dans notre
galaxie, qui puissent nous visiter n1Les ovnis sont donc autre chose, qu'il s'agisse de méprises+canulars, de phénomènes
paranormaux, visiteurs temporels, d'intra-terrestres, etc.
Parce que les probabilités d'apparition de la vie sont très inférieures à celles que l'on
imagine : Nous sommes les seuls ou très peu nombreux exemples de vie intelligente dans la Voie Lactée
s3 Ward, P.D. & Brownlee, D. : Rare Earth: Why Complex Life is Uncommon in the
Universe, Springer-Verlag, New York, 2000..
La remise à zéro (reset) : des phénomènes cosmiques destructeurs, tels que les
explosions de rayons gamma (gamma-ray bursts), anéantissent régulièrement toute vie avant
qu'elle ne
soit capable de voyage interstellaire
L'autodestruction : les civilisations "intelligentes" finissent par s'autodétruire avant
d'être capable de développer des communications interstellaires s4 Shklovskii, I.S. & Sagan, C.: Intelligent
Life in the Universe, Holden-Day, San Francisco, 1966.s5Sagan, C.: Communication
with Extraterrestrial Intelligence (CETI), MIT Press, Cambridge, MA, 1973..
L'auto-limitation qui pose qu'une civilisation intelligente ne peut maintenir une
croissance exponentielle au niveau galactique, soit par contrainte s6S. von Hoerner, "Population explosion and interstellar expansion", Journal
of the British Interplanetary Society 28 (1975) 691-712. soit par choix, pour éviter un
effondrement écologique par épuisement des ressources dont elle dispose s7Diamond, J.M. : Collapse: How Societies Choose to Fail Or Succeed, Viking Press, 2005..
C'est ce qu'on appelle la "solution de durabilité" (substainability solution) s8Haqq-Misra, J.D. & Baum, S.D. : "The
sustainability solution to the Fermi paradox", Journal of the British Interplanetary Society n° 62 (2009) pp. 47-51. au paradoxe. Une
version intermédiaire consiste à théoriser qu'une telle civilisation
adopte un déploiement beaucoup plus lent pour rester viable s9Newman, W.I. & Sagan, C.: "Galactic civilizations: Population dynamics and interstellar diffusion", Icarus n° 46 (1981) 293-327..
Il existe des civilisations extraterrestres, mais :
Elles apparaîtront après nous : par un hasard extraordinaire et malgré les probabilité dues
à l'âge de l'univers, nous serions les premiers.
elles ne peuvent nous visiter en raison de difficultés impondérables du voyage
interstellaire (distance/vitesse). Et bien qu'ils pourraient être capables de communiquer avec nous,
leurs tentatives ont toujours échoué s10Sagan, C.: Communication with Extraterrestrial
Intelligence (CETI), MIT Press, Cambridge, MA, 1973.s11S.A. Kaplan, Extraterrestrial Civilizations: Problems of Interstellar Communication, Israel Program for Scientific Translations, Jerusalem, 1971.s12 P.S. Wesson, "Cosmology, extraterrestrial intelligence, and a resolution of the Fermi-Hart paradox", Quarterly
Journal of the Royal Astronomical Society 31 (1990) 161-170..
Nous sommes dans un "zoo" s13 Ball, J.A.: "The zoo hypothesis", Icarus n° 19 (1973) pp. 347-349.
: elles nous connaissent, mais veulent nous laisser seuls pour l'instant et observer notre développement. Un
contact généralisé pourrait alors intervenir à partir d'un seuil d'évolution/de développement minimum s14Deardorff, J.W.: "Examination of the embargo hypothesis as an explanation for the great silence", Journal
of the British Interplanetary Society n° 40 (1987) pp. 373-379.. Des variantes complotistes de cette hypothèse envisagent qu'elles
interragissent avec nos gouvernements, mais en secret, de manière à ce que nous n'en soyons pas avertis.
Elles nous visitent belles et bien :
ce sont certains ovnis observés sur terre
c'est autre chose que nous sommes incapables de voir
pour des raisons physiques
pour des raisons de psychologie de la perception (nous sommes incapables de les reconnaître)
ils sont (ou leurs traces s'ils ne sont plus là) dans notre système solaire que nous sommes en fait loin
d'avoir entièrement exploré s15Freitas, Robert A., Jr.: "There
Is No Fermi Paradox", Icarus 62, pp. 518-520 (1985),
Received June 25, 1984: revised March 18, 1985.
Elles n'auraient pas encore eu le temps de nous trouver, comme le
rend possible le modèle mathématique de Rasmus Bjork publié en janvier 2006 en limitant le nombre de
sondes (pour qu'elles n'interfèrent pas entre elles, ou parce que la durée de vie d'une civilisation ne
permettrait pas d'atteindre le stade technologique de sondes capables de se répliquer).
Elles ne maintiennent pas leur intérêt pour le voyage et
leurs activités sont sous notre seuil de détectabilité actuel
certaines de leurs activités sont détectables mais aujourd'hui observées comme des phénomènes encore
inexpliqués ou incorrectements expliqués ("masse manquante" galactique, quasars, et galaxies explosant
comme Cygnus A, etc.) s16Freitas, Robert A., Jr.: "Extraterrestrial
Intelligence in the Solar System: Resolving the Fermi Paradox", Journal of the British
Interplanetary Society n° 36, novembre 1983, pp. 496-500.
Pour certains, ces tentatives d'explications et rationalisations apparaissent presque comme des excuses, mélange
d'une arrogance humaine dépassée, d'anthropocentrisme et de complexe d'infériorité intergalactique. Car en fait,
plus le temps passe, et plus le paradoxe semble se renforcer, incompréhensiblement : nous évaluons de mieux de mieux
la taille immense de notre univers, nous comprenons de mieux en mieux le processus de formation des planètes et ce
que seraient des zones habitables, nous découvrons chaque jour un peu plus de planètes extrasolaires, découvront que
la vie est survenue en relativement peu de temps sur Terre, que la panspermie est de plus en plus probable, que la
vie peut se nicher là où ne l'imaginait pas (extrêmophiles), que l'univers d'une manière générale semble bien adapté
à l'émergence de vie, que notre propre évolution intelligente semble exponentielle... et pourtant nous semblons
seuls. La réponse au paradoxe de Fermi est donc peut-être plutôt que nous appréhendons mal le problème s17Dvorsky, George P.: "The
Fermi Paradox: Back with a vengeance", Sentient Developments, samedi 4 août 2007.