Ce qui est affirmé sans preuve peut être nié sans preuve s1Euclide
Selon la méthode scientifique actuelle, la charge de la preuve (burden
of proof) revient à l'auteur d'une affirmation non encore prouvée. Sans une telle preuve,
la science continuera à considérer ses hypothèses
et théories comme valides. A cet état de fait, certains partisans d'une
théorie non prouvée pourront répondre que l'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence
, ce qui
est tout à fait vrai et pas incompatible avec la réservation du jugement du scepticisme
qui se garde d'affirmer l'inexistence de quelque chose. Une telle affirmation, typique du
rationnalisme, est en outre indémontrable. Elle est juste
supposée vraie au travers d'une croyance soutenue par un réductionnisme fort contestable. Un réductionnisme
identique à celui utilisé par les partisans d'une existence par défaut (i.e. si vous ne me
prouvez pas que ça n'existe pas, c'est que je suis fondé à croire que ça existe). Toute affirmation, négative
comme positive, est sujette à des vérifications légitimes (observation validant la prédiction d'une théorie
typiquement).
Le rasoir d'Ockham (souvent mal orthographié Occam) est fréquemment
invoqué pour satisfaire un principe de parcimonie
: les entités existantes, selon ce principe, ne doivent
pas être multipliées plus qu'il n'est nécessaire. Cela signifie que l'on donnera préférence à la plus petite
théorie possible, avec le moins d'objets possibles dans le modèle attendu, et le moins d'hypothèses ad
hoc possibles.
Le principe de parcimonie est en fait plus catégorique que l'idée d'origine émise par
Ockham, qui ne l'émettait que toutes choses étant égales par
ailleurs
(comparer ce qui est comparable, qui produit les mêmes résultats par exemple). Dans la même
veine, il existe le rasoir d'Hanlon, qui dit N'attribuez jamais à la malice ce qui peut être expliqué de
façon adéquate par la stupidité
).
Cependant ce principe, s'il est intéressant, n'est pas une règle absolue, comme le rappelle
Morrison : C'est un critère purement économique ; ce n'est pas le seul
guide pour la science — ce n'est en aucune manière un guide sûr pour la science. C'est simplement un
guide, mais je le trouve assez intéressant
s2[Morrison 1969]. Pour
Morrison le témoin doit être considéré comme un instrument complexe, avec
ses avantages et ses inconvénients comme les autres, et ce qui compte avant tout est de prendre en compte
correctement l'ensemble des liens reliant le phénomène observé à la mesure.
Il est souvent imaginé que pour prouver quelque chose, il suffit d'un cas indubitable. Même les sceptiques, à l'instar des plus fervents croyants, prétendent qu'un fragment de corps extraterrestre, un bout de vaisseau spatial, ou même une soucoupe atterrissant Place de la Concorde devant des caméras télévisées pourraient suffire à installer un consensus.
Cette idée est probablement entretenue par l'histoire de l'acceptation des météorites, suite à une chute de
météores sur le village de L'Aigle, au début du siècle. Il ne faut pas faire dire à
cette histoire ce qu'elle ne dit pas. Les scientifiques de l'époque n'ont pas du jour au lendemain changé d'avis
suite à cet événement. Jean-Baptiste Biot, en allant étudier le phénomène sur place, en recoltant d'autres
éléments, a simplement fait de la bonne science, et a finit par convaincre. C'est ce que rappelle
Marcello Truzzi dans son texte ses
réflexions sur la réception des déclarations non
conventionnelles en science : Bien trop souvent en parapsychologie les gens parlent comme si des
déclarations cryptoscientifiques étaient faites, comme si une seule expérience critique pouvait la prouver.
C'est ridicule du point de vue scientifique. L'histoire et la philosophie des sciences a montré qu'il
n'existe pas d'expérience critique. Une seule expérience ne change pas le corps de la science. Des
reproductions et des changements de théorie doivent suivre, et peut-être la vision du monde dans son
ensemble doit changer.
Ainsi, un cas, aussi extraordinaire fusse-t-il, ne constitue généralement pas la preuve d'une généralité. Un bout de corps extraterrestre, de soucoupe, un film... seraient faute de toute reproductibilité (un 2ᵉ, 3ᵉ corps, ou bout de soucoupe, etc.) simplement qualifiés d'inconnus, de "non expliqués". Probablement même proposerait-on des explications improbables à leur sujet.
Avant que David Hume dise que des déclarations extraordinaire demandent des
preuves extraordinaires
et que Carl Sagan la reprenne, Laplace lui-même
avait posé le principe selon lequel l'importance de la preuve doit être proportionnée à l'importance de
l'allegation
.
Références :