Les nombreux rapports d'observation de en provoquèrent une prise de conscience de la nation, et l'Air Force prit en mains la situation. Quand le cas Thomas Mantell se produisit (il mourut alors qu'il pourchassait un ovni dans son avion de l'Air Force - voir Annexe), l'Air Force était prête à débuter ses investigations.
Le projet Sign fut placé sous la juridiction de l'Intelligence Division de l'Air Force Air Material Command à Wright Field (Ohio) (c'est maintenant Wright-Patterson Air Force Base). Cette division a été ultérieurement rebaptisée Air Technical Intelligence Center (ATIC) et fut la base pour les investigations sur les ovnis jusque en où la responsabilité des investigations fut transférée à un service nouvellement crée, la Division des Technologies Etrangères. Sa fonction était de "collecter, collationner, évaluer et distribuer aux agences et contractants concernés du gouvernement toutes les informations concernant les observations et les phénomènes que l'on pourrait considérer comme ayant un impact sur la sécurité nationale".
La grande variété d'opinions sur les ovnis et leurs origines existaient déjà en , lorsque l'attention fut d'abord focalisée sur leur origine. Il y avait ceux qui les considéraient comme des objets conventionnels, et ceux qui pensaient que c'étaient des véhicules extraterrestres. Les membres de ce dernier groupe tenaient les rênes du pouvoir le projet Sign durant les premiers mois, et après l'incident de l'Eastern Airlines (voir Annexe) ils publièrent une Estimation de la situation dans laquelle ils concluaient que les ovnis étaient des vaisseaux venus d'Outre-Monde. Le général Hoyt S. Vandenberg, alors chef d'état major, rejeta cependant ce rapport, en raison du peu de preuves à l'appui de cette théorie. Le rapport a été classé Top Secret. (60) et après l'action de Vandenberg, toutes les copies ont été détruites.
Ce manque d'approbation conduisit à une réorganisation du projet Sign, et ceux qui pensaient que les ovnis étaient des objets conventionnels prirent la tête. en l'Air Force annonça que le nom classifié "Sign" avait été compromis de telle sorte qu'il était changé pour le nom de projet "Grudge" (rancune - et ils insistèrent sur le fait qu'il n'y avait aucune relation entre le nom et le projet), et le groupe "Sign" publia un dernier rapport. Le changement de politique est facilement mis en évidence par les recommandations du groupe qui dit entre autre :
L'activité future de ce projet devra être conduite au niveau minimum nécessaire pour enregistrer, récapituler et évaluer les données reçues sur les futures observations et pour terminer les investigations spécifiques qui sont en cours actuellement. Quand et si un nombre suffisant d'incidents sont résolus pour indiquer que ces observations ne représentent pas un danger pour la sécurité de la nation, les activités particulières de ce projet à cette activité pourront être terminées. Les investigations futures sur des rapports seront traitées sur une base de routine comme tous les autres travaux de renseignements.(61).
En dépit des controverses existantes et du manque de consensus interne, le projet Sign a été bien mené. Ils ont rapidement identifié le problème du "Rapport Signal sur Bruit" et ont pris des mesures pour le prendre en compte. Le docteur J. Allen Hynek, un astronome de l'Université de l'Etat de l'Ohio (aujourd'hui à l'Université du NorthWestern) et l'Air Weather Service ont été engagés pour identifier parmi les rapports ceux qui étaient clairement des objets astronomiques ou des ballons météo (et il y en eut un grand pourcentage). Le problème majeur des dirigeants du projet fut leur inexpérience à déterminer quel cas devait faire l'objet d'une étude ultérieure.
Comme elle n'était pas familiarisée avec le phénomène, la Direction du Projet perdit énormément de temps sur des observations qui étaient de toute évidence des avions, des météores, ou des plaisanteries. Elle perdit également beaucoup de temps en examinant la vie privée des témoins pour voir s'ils étaient dignes de confiance. Sign faisait régulièrement le point avec les bureaux appropriée du FBI, avait accès aux dossiers des criminels et des éléments subversifs fournis par la police, et le personnel interrogeait les collègues de bureau, les amis et les relations des témoins. Cependant, le personnel de Sign fit un effort louable en considérant que ces premières observations contenaient habituellement trop peu d'informations sur lesquelles on puisse baser un jugement et que l'Air Force n'avait pas de méthodes standardisées pour faire le compte-rendu d'observations(62).
L'Air Force continua ses investigations sur les ovnis avec le projet Grudge même après que les gens impliqués furent convaincus qu'il n'y avait aucune nature hostile ou militaire dans ces phénomènes. L'Air Force désirait conserver le contrôle des investigations sur les rapports, ce qui évitait à la communauté scientifique de conduire leurs propres études, du fait que tous les "bons" rapports étaient détenus et classifiés par l'Air Force. De cette manière, l'Air Force aiguisa la nature de la controverse pour les 21 années pendant lesquelles elle fut impliquée, le projet GRUDGE était décidé à expliquer chaque observation.
Ruppelt rapporte que l'Air Force, pour contribuer à la démystification des ovnis accorda la permission à Sidney Shallet du Saturday Evening Post d'avoir accès à leurs dossiers pour un article sur le sujet. Il voulait s'assurer que l'article exposerait le problème ovni comme une perte de temps.
Comme un officier des relations publiques me le dit plus tard, "nous avons perdu un sacré temps". "Tous les écrivains qui s'intéressaient aux histoires de soucoupes avaient fait leurs propres enquêtes sur les observations et nous n'arrivions pas à les convaincre qu'ils s'étaient trompés..." J'ai souvent entendu, de la part des militaires et des civils, que l'Air Force avait dit à Shallet exactement ce qu'il raconte dans son article - amusez-vous avec les ovnis - n'écrivez rien - ne suggérez rien qui pourrait laisser penser qu'il y a quelque chose d'étranger dans nos cieux. Je ne pense pas que ce soit le cas. Je pense qu'il a juste raconté l'histoire des ovnis comme on le lui a raconté, mais raconté par le projet Grudge.(63).
L'article parut, mais produisit l'effet inverse à celui escompté par l'Air Force. Des phrases telles que "la plus complète et la plus fertile absurdité et "la grande peur des soucoupes volantes" étaient destinées à convaincre les lecteurs qu'il n'y avait rien de vrai avec les rapports sur les ovnis, mais dans les quelques jours qui suivirent la publication, il y eut une recrudescence de témoignages d'ovnis. Certains attribuèrent cela au fait que Shallet avait reconnu que certains cas restaient inexpliqués, tandis que d'autres pensent que ce phénomène était dû à la suspicion qui entourait les méthodes d'investigation de l'Air Force. Dans tous les cas, le projet Grudge fut noyé sous un déluge de comptes-rendus.
Ceci pourtant ne les découragea pas, et seulement six mois plus tard, le projet Grudge fournit son rapport final. Commentant 244 cas, et en dépit de leurs efforts soutenus pour les expliquer tous, (et suivant les dires d'une manière hautement spéculative dans de nombreux cas), 23 % des cas restèrent inexpliqués. Pour ces cas, Grudge déclara "pour les observations d'Objets Volants Non Identifiés, il y a suffisamment d'explications psychologiques pour permettre une explication plausible à ces comptes-rendus ne pouvant être expliqués d'une autre manière". En d'autres termes, les cas qui ne purent être identifiés furent considérés comme ayant été motivés psychologiquement et un point c'est tout. Ils conclurent en disant que les investigations sur les ovnis devaient être réduites uniquement à des rapports qui "laissaient clairement indiquer des applications techniques réalistes" afin de les soumettre à l'ATIC.
Ils suggérèrent cependant que la Psychological Warfare Division soit informée des résultats de l'étude, car si l'ennemi plaçait simultanément une série d'objets aériens au-dessus des Etats-Unis et que débutaient des rumeurs qu'il y avait des vaisseaux extra-terrestres, il pourrait s'ensuivre une hystérie de masse. Quoi que beaucoup pensent que le projet Grudge se termina après la publication du rapport final, il continua en fait de fonctionner bien que d'une manière réduite, pendant encore 2 ans.
En dépit de ses efforts pour démystifier les comptes-rendus, l'intérêt du public continua et les articles de magazines proliférèrent ; de même que les livres écrits par des auteurs tels que le major Donald Keyhoe, qui fut plus tard président du NICAP.
en , le capitaine Edward Ruppelt fut placé à la tète de Grudge et il apporta un sang nouveau au projet, car il n'était pas convaincu comme son prédécesseur que les ovnis étaient une étude sans valeur. Il engagea formellement Hynek en tant que consultant, et suite à ces efforts, le personnel et le budget du projet furent augmentés. Il reconnu que beaucoup de pilotes de l'Air Force n'étaient pas enclins à faire des comptes-rendus d'observations d'ovnis par crainte du ridicule, et il fit en sorte que de nouvelles consignes soient données, et des formulaires standards de comptes-rendus furent disponibles. L'Air Force Letter 200-5 enjoint à chaque base de l'Air Force dans le monde de télégraphier immédiatement toutes informations sur une observation d'ovnis à Ruppelt à ATIC et aux autres commandements de l'Air Force, avec un rapport complet envoyé ultérieurement à ATIC. en , Grudge était un projet très bien organisé.