On a vite fait de dire : c'est puéril.
Ce qui est puéril, c'est de se figurer
qu'en se
bandant les yeux devant l'Inconnu,
on supprime l'Inconnu s1Victor Hugo,
Contemplation Suprême
Pour l'immense majorité du public, le problème des soucoupes volantes se présente actuellement, en en , de la façon la plus simple du monde : les soucoupes volantes sont une fumisterie, ceux qui en voient sont des farceurs ou des illuminés, et le problème n'existe pas. Je prendrai donc ici le problème en cet état, m'adressant par hypothèse au lecteur dont le siège est fait et qui ne consentira à parcourir cet article que par indulgence. Je lui demanderai seulement l'effort d'un peu d'attention et un esprit critique en éveil.
Le problème des soucoupes volantes vient en tête du bataillon des damnés, des exclus de la science, dont parlait Charles Fort. En notre pays du moins ; car aux États-Unis et en URSS, pour ne citer que ces deux pionniers de la science moderne, des organismes officiels ont reçu la mission d'établir des fiches, de dresser des statistiques, de tracer des courbes pour tenter de trouver une explication, quelle qu'elle soit, aux rumeurs persistantes concernant l'apparition de mystérieux objets dans le ciel. La clameur qui montait de toute part a paru suffisamment forte pour que des gens sérieux s'efforcent d'en saisir le sens. En ouvrant ce dossier en France, j'ai seulement le sentiment de me substituer à d'autres chercheurs disposant de moyens d'investigation plus puissants que les miens et qui peut-être auraient dû, à l'instar de leurs collègues étrangers, aller jeter un coup d'œil de ce côté. Cette revue est celle des ouvertures de la science ; elle s'efforce de comprendre la connaissance lorsqu'elle est en marche et non simplement lorsqu'elle est arrêtée. Pour la raison même qu'elle a choisi délibérément cette position marginale pleine d'inconfort, elle est plus qu'aucune autre férocement opposée aux fausses sciences. Je m'en tiendrai dans cette étude à la règle qu'elle s'est donnée pour explorer le domaine immense de l'inconnu : l'utilisation rigoureuse de la méthode scientifique. Celle-ci donne à celui qui y recourt un 1er droit : le droit de poser des questions, toutes les questions.
Et d'abord, la soucoupe volante est-elle possible?
Poser cette question, c'est se demander si compte tenu des connaissances actuelles de l'astronomie, de la biologie et de la physique, et de cela seul, il est contradictoire, possible ou vraisemblable que des engins artificiels, produits d'une technologie non humaine, soient aperçus dans les parages de notre planète.
Sur le point qui nous intéresse, cette science nous donne les précisions suivantes:
La Terre, où est apparue la seule vie que nous connaissions directement, est une des 9 planètes du Soleil.
Nous ne savons pas si la vie existe sur les 8 autres, sauf en ce qui concerne Mars, où les analyses spectrophotométriques de l'Américain William Sinton au Mont-Palomar ont prouvé, en et en , la nature organique des taches sombres variant au sol avec les saisons martiennes ; conjuguées avec les résultats polarimétriques du Français Audoin Dollfus sur les mêmes taches sombres, les analyses de Sinton ont pour la 1ʳᵉ fois dans l'histoire donné la preuve d'une vie extra-terrestre. En effet, les plages sombres de Mars présentent un ensemble de caractères appartenant à la vie et à elle seule : leur nature chimique est organique, elles se régénèrent au printemps, elles poussent au-dessus du sol, et leur évolution saisonnière est en rapport avec la présence de l'eau. Le système solaire comporte donc au moins 2 planètes vivantes : la Terre et Mars.
D'autre part, le Soleil n'est qu'une étoile parmi les 200 milliards d'étoiles environ que compte notre galaxie. Il appartient à la classe spectrale G, relativement nombreuse (au moins plusieurs milliards dans notre seule galaxie). C'est une étoile à rotation lente, et nous savons maintenant que toutes les étoiles à rotation lente (1 sur 10 certainement, et peut-être 1 sur 4) ont des planètes. Il y a donc dans notre système galactique au moins 20 milliards et peut-être 50 milliards d'étoiles dotées d'un système planétaire. Ceci est une évaluation statistique, mais les spécialistes de l'astrométrie (Hölmberg, Schlesinger, et surtout Van De Kamp) ont mis en évidence par des méthodes directes la présence de corps planétaires autour de 1 sur 6 environ des étoiles les plus rapprochées de nous, astres tout à fait quelconques par ailleurs.
Enfin (et nous verrons tout à l'heure l'importance de cette donnée astronomique), les étoiles ont des âges. Certaines sont en voie de formation.
D'autres, comme le Soleil, ont un âge moyen (environ 8 ou 10 milliards d'années). D'autres enfin, surtout dans les amas globulaires, sont très vieilles : jusqu'à 20 et même 35 milliards d'années. Les étoiles jeunes sont à rotation rapide, les autres généralement à rotation lente, ce qui montre que la formation d'un système planétaire autour des étoiles est un événement normal de leur longue vie. L'étude de l'âge de la Terre et des météorites confirme d'ailleurs que les planètes de notre système solaire se sont formées peu après le Soleil lui-même.
La vie terrestre est omniprésente : au fond des océans, à la surface du sol, dans l'air, dans le froid des pôles aussi bien que sur l'équateur, dans les sources sulfureuses, dans les cavernes. dans l'eau presque bouillante des geysers, dans le pétrole, et jusque dans l'eau lourde des piles atomiques. Elle s'adapte a tous les milieux, pourvu que la température n'y excède pas 100 °C. Elle vole, elle rampe, elle nage, elle s'enracine, elle se parasite elle-même, elle organise les plus extravagantes symbioses.
Cette effarante diversité est une première présomption en faveur de son universelle adaptabilité et, par conséquent, de sa présence partout où les conditions ambiantes le permettent.
Mais la découverte de la vie sur Mars transforme la présomption en certitude. Frank B. Salisbury, professeur de botanique à l'Université de Colorado, a étudié pendant des années les organismes terrestres supposés pouvoir subsister dans le milieu martien : ni les mousses ni les lichens, chers à la vulgarisation de naguère et même à certains astronomes actuels peu informés de biologie, n'ont résisté à ses observations et à ses expériences. Seules certaines algues s'accommoderaient peut-être des conditions de la planète rouge : mais, d'un autre côté, des algues ne rendent pas compte des faits observés sur Mars.
La vie martienne, dit Salisbury, est donc autre chose, ce qui est bien confirmé par l'identification des acétaldéhydes dans les régions sombres par Sinton. Non seulement, donc, la vie terrestre s'accommode de toutes les conditions terrestres, mais la première vie extra-terrestre avec laquelle la science ait établi un contact expérimental apparaît d'emblée comme très différente de tout ce que nous connaissons et capable de subsister dans des milieux délibérément aberrants à nos yeux.
L'observation des variations saisonnières sur Mars montre de plus que la vie y est hautement adaptée. Elle évolue en effet au printemps avec une foudroyante rapidité (de Vaucouleurs), envahit les déserts (Antoniadi, Phocas), change d'année en année (Antoniadi, Slipher), efface en quelques jours l'effet des grandes tempêtes de poussière jaunâtre (öpik). Tout cela, pour le biologiste, traduit une organisation complexe, fortement adaptée et différenciée, et par conséquent une évolution ancienne ayant abouti à un vaste système en équilibre, comparable, par ses effets globaux, à celui au milieu duquel nous vivons. Certes, nous n'en voyons, à 60 millions de km de distance, que l'aspect végétal, et il ne peut en être autrement : transportés sur Mars, les instruments des astronomes que je viens de citer ne verraient, eux aussi, que les forêts et les campagnes terrestres. Mais l'écologiste, qui est le spécialiste des milieux vivants, sait par expérience qu'un cycle biologique ne peut persister qu'en se bouclant, et que là où il y a un chou, il y a une chèvre pour manger le chou, un loup pour manger la chèvre, des parasites sur le chou, la chèvre et le loup, des bactéries pour rendre leurs cadavres au "terreau" de la biosphère.
Le peu que nous savons de la vie martienne nous la montre donc globalement semblable à la vie terrestre par les grands processus de son évolution, même si le détail est destiné à nous échapper pendant quelques années encore, et, précision d'une importance capitale, même si son infrastructure biologique, climatologique, géophysique, est presque totalement différente de celle de la vie terrestre. Ce dernier fait nous contraint à la généralisation suivante: puisque la vie existe avec tous ses caractères essentiels dans des milieux aussi différents que le milieu terrestre et le milieu martien, c'est qu'elle n'est nullement tributaire du milieu terrestre, et qu'il faut s'attendre à la voir proliférer sur des myriades de planètes, même très différentes de la Terre et de Mars.
Mais ce n'est pas tout. Sur Terre, la vie est entrée en évolution dès ses origines. La paléontologie en suit le progrès constant et accéléré à travers les âges géologiques depuis le précambrien jusqu'à l'homme. La haute adaptation de la vie martienne, qui se traduit par l'aisance et la rapidité de ses variations saisonnières, nous montre qu'il en a été de même sur la planète Mars. On peut, certes, en attendant la preuve formelle, décider de croire que la Terre et Mars sont des exceptions, qu'elles sont les deux seules planètes à biologie évolutive de l'univers, mais il est évident que les motifs d'une telle croyance ne sauraient être que d'ordre théologique et que les connaissances acquises à ce jour nous inclinent toutes à penser le contraire. Le même raisonnement s'impose à nous sur la question de savoir si le niveau humain atteint par l'évolution terrestre à l'ère quaternaire est une exception ou une généralité. II s'impose même avec encore plus de force, car toute la paléontologie terrestre nous montre avec une invincible évidence le processus d'hominisation en marche dans le règne animal depuis les âges les plus reculés, depuis l'apparition des premiers mammifères, et même depuis les premiers êtres à système nerveux central.
Les millions d'espèces qui ont précédé les animaux actuels témoignent que l'homme n'est nullement le produit d'un hasard miraculeux, mais bien l'aboutissement d'une longue recherche de toute la vie animale terrestre, un aboutissement inévitable et fatal. La meilleure preuve en est le nombre extravagant d'ébauches humaines variées qui ont précédé notre réussite, si c'en est une, et dont les paléontologistes retrouvent un peu partout les fossiles : si nous n'étions pas là, nous, les Homo Sapiens, quelqu'un d'autre y serait.
La pensée technologique et scientifique a donc toutes les chances d'être presque aussi répandue dans l'univers que la vie elle-même. Là encore, certes, on peut arguer de raisons théologiques pour croire le contraire. Mais toutes les évidences scientifiques vont dans ce sens.
Et c'est ici qu'il faut rappeler les précisions données tout à l' heure sur l'âge des étoiles. La pensée rationnelle est apparue dans le système solaire (sur Terre) vers le 8ᵉ ou le 10ème milliard d'années de son âge. D'autre part, l'histoire humaine montre que le stade historique de la conquête de l'espace par cette pensée a été atteint après quelques siècles à peine du développement de la recherche technologique. 350 ans après Galilée, les premiers engins humains croisent au large de Vénus (Mariner II) et de Mars (Mars I). Où en seront les hommes dans un millénaire ? Mais surtout, où en seront-ils dans un million, dans un milliard d'années ?
Or, nous l'avons vu, il existe une foule innombrable d'étoiles qui ont commencé à évoluer des milliards, et peut-être des dizaines de milliards d'années avant le Soleil. Quels niveaux inimaginables ont pu atteindre et franchir les sociétés intelligentes apparues dans ces systèmes planétaires ? N'est-il pas conforme à toutes les vraisemblances de prévoir que ces sociétés ont depuis des temps fabuleux pleinement domestiqué la technique de la communication et du voyage intersidéraux ?
La théorie de la relativité nous avertit qu'aucune masse physique ne saurait atteindre la vitesse de la lumière, et à plus forte raison la dépasser. Si cette théorie était le dernier mot de la science, les voyages intersidéraux seraient difficiles à cause de leur durée, quoique possibles cependant. L'aller et retour vers la plus proche étoile prendrait huit ans. Mais nous savons que la relativité n'est pas le dernier mot de la science, et ceci pour une raison fort simple : c'est que toutes les tentatives pour établir une théorie unitaire ont jusqu'ici échoué. L'Univers physique échappe donc encore à notre intelligence, au moins par un de ses aspects fondamentaux. Nous ne connaissons pas les limites du possible en science et en technique, et aucun homme de science ne saurait se risquer à fixer d'avance ces limites qui n'existent probablement pas.
Les présomptions les plus raisonnables et les plus assurées de la science nous conduisent par conséquent à admettre qu'en un nombre immense de points de l'espace, la technique du voyage intersidéral est depuis longtemps maîtrisée, et que des engins conduits par une pensée voyagent constamment dans la Galaxie. Pour avoir le droit de refuser cette idée (familière depuis longtemps à la science-fiction), il faut préalablement récuser l'une ou l'autre des certitudes suivantes : l'âge commun des planètes et du Soleil, l'apparition de l'homme sur la terre à l'ère quaternaire, la vie sur Mars, l'existence de systèmes planétaires autour d'une forte proportion des étoiles, et enfin la formidable antiquité d'un nombre énorme d'entre elles. Accepter cela, c'est reconnaître l'existence des soucoupes volantes, que nous les ayons vues ou non. Et pour le refuser, il faut se mettre en contradiction avec l'une ou l'autre des principales sciences actuelles.
Ce raisonnement n'est pas nouveau. Un homme de génie, l'Américain Charles Fort, l'avait
déjà fait très clairement il y a une quarantaine d'années. La seule différence, c'est que Charles Fort
ne pouvait appuyer sa pensée que sur des présomptions, et que ces présomptions sont devenues par la suite des
certitudes. II supposait que les étoiles avaient des planètes comme le Soleil, que certaines étaient plus âgées que lui, et que la vie pouvait
apparaître presque n'importe où. Mais rien de cela n'était encore prouvé. Sa conclusion n'en était pas moins limpide
: S'il y a tant d'astronefs dans l'espace sidéral, se demandait-il, pourquoi ne les voyons-nous pas
?
Actuellement, la même question doit être posée différemment. Un nombre considérable de personnes affirment en effet les avoir vus, et une nouvelle discipline est née, celle de l'étude des témoignages. Des commissions d'enquête ont été créées, les unes officielles comme l'Air technical Intelligence Centerd28Remplacé par FTD aux Etats-Unis, d'autres privées. Des chercheurs se sont peu à peu spécialisés dans cette recherche depuis une quinzaine d'années. Ils sont une cinquantaine dans le monde, et je les connais tous. La plupart d'entre eux poursuivent leur travail clandestinement en raison du discrédit jeté sur ce genre de recherche, réputé "pas sérieux". Ce sont des astronomes professionnels, des techniciens de l'aéronautique, des ingénieurs, des physiciens. Les extravagances et les impostures d'un nombre considérable de charlatans les incitent d'ailleurs autant à la prudence que la suspicion de leurs collègues. Mais les résultats acquis ne sont pas moins intéressants. Ce sont ces résultats que nous allons maintenant examiner.
Il existe deux méthodes susceptibles d'opérer une évaluation grossière du nombre de personnes qui, dans le monde entier, disent avoir vu des objets dont la description ne peut être expliquée ni par des bolides, ni par des météores, ni par des ballons sondes, ni par quelque phénomène connu que ce soit. La première consiste à faire la somme des dossiers répandus dans les fichiers existants. Mon propre fichier comporte près de 2000 cas, dont les 4/5èmes environ en provenance du territoire français. Diverses supputations aboutissent à un nombre de l'ordre de trente à quarante mille dans le monde entier. Dans une bonne partie des cas, disons la moitié, il y a eu plusieurs témoins.
Mais cette évaluation ne vaut pas grand-chose, car la plupart des observations ne sont pas communiquées aux chercheurs : les témoins répugnent en effet à passer pour fous. Nous éprouvons ici l'effet des campagnes de presse orchestrées par ceux que Louis Pauwels appelle les "Messieurs en noir", et qui sont, non pas précisément les savants en place, mais ceux d'entre eux dont ils dépendent administrativement, augures qui tranchent du haut de leur position officielle sans avoir le moins du monde étudié ce dont ils parlent, et qui ont d'ailleurs, pour les honneurs, abandonné depuis longtemps toute recherche.
D'où l'intérêt de la 2nde méthode, qui est le sondage. Dès en , l'expérience de mes enquêtes m'avait conduit à la conclusion suivante : en France, on peut dire qu'une personne prise au hasard, ou bien a vu, ou bien connaît quelqu'un qui a vu. La difficulté est de chiffrer le nombre moyen d'individus que connaît personnellement chaque Français. Si l'on admet le chiffre de 200, cela donne pour la France entière plus de 200 000 témoins.
Voici un 2ᵉ type de sondage, réalisé aux États-Unis par le capitaine Ruppelt du temps qu'il dirigeait la commission d'enquête de l'ATICd29Remplacé par FTD, vers les années en . Une enquête confidentielle effectuée auprès des astronomes américains observateurs (les théoriciens, qui ne regardent jamais le ciel, étant évidemment laissés de côté) aboutit à fixer le pourcentage des témoins à 11% dans cette corporation supérieurement entraînée à l'étude du ciel. A noter qu'en public tous ces témoins proclament hautement que les soucoupes volantes sont une fumisterie, et que jamais quelqu'un de sérieux n'a aperçu l'ombre d'une.
3ème type de sondage: un de mes amis américains, professeur dans une université et spécialiste très connu
de Mars, a fait aux États-Unis
en
une série de conférences sur cette planète; le public était essentiellement constitué d'hommes de science ; ayant
eu la malice de terminer chacun de ses exposés par cette phrase: ... mais évidemment, la meilleure preuve de
l'existence d'une vie extra-terrestre serait l'observation d'un engin venu d'une autre planète
, il
obtint presque régulièrement le témoignage d'un ou de plusieurs de ses auditeurs. Pourcentage des témoins : 1,5 %, soit nettement plus que ma propre évaluation de 1958.
Détail du plus haut intérêt : aucun de ces cas n'avait été rapporté à la Commission d'enquête de l'Armée de l'Air
ni aux journaux.
Il est donc bien certain que nous ne possédons dans nos fichiers qu'une infime proportion des observations.
A côté du témoignage humain, il y a celui des appareils. Ecartons tout d'abord un certain type de cas, bien étudiés en France par le professeur Vassy, ou l'apparition de taches mobiles sur l'écran radar est imputable à des inversions de température et à un effet de mirage dans le spectre des ondes utilisées. Il s'agit là d'un phénomène bien connu des spécialistes et sans aucun rapport avec l'objet de cette étude. La tache de l'écran radar ne peut jamais, dans ce cas, être observée visuellement, et pour cause : elle n'existe que sur l'écran.
Voici en revanche un cas français que j'ai bien étudié à l'époque.
Dans la nuit du le , apparaissait sur le radar d'Orly une tache correspondant à un objet d'une taille 2 fois supérieure à celle des plus grands appareils alors en service. Aucun avion n'étant signalé dans la région, les techniciens se bornèrent d'abord à suivre les évolutions de l'objet supposé, évolutions fantastiques, puisque les vitesses variaient du sur-place le plus rigoureux à 2500 km/h (notons, au passage, que, d'après une étude américaine que je citerai tout à l'heure et qui fait autorité, cette vitesse exclut déjà l'hypothèse de l'inversion de température).
Mais voici qu'un DC 3 de la ligne de Londres apparaît dans le champ de l'appareil. L'objet inconnu, qui à ce moment était stationnaire, est vu sur l'écran démarrant à une vitesse foudroyante et fonçant vers le DC 3. La tour d'Orly appelle alors ce dernier pour lui demander s'il ne voit rien.
Je vois une lumière rouge clignotante qui se dirige vers moi apparemment à très grande vitesse, répond le pilote.
Quelle position attribuez-vous à cette lumière ?
La verticale des Mureaux.
C'était la position repérée au radar. Le pilote du DC 3 dut changer de cap pour éviter une collision qui lui semblait imminente, puis l'objet disparut à ses yeux.
Je ne vois plus rien. Avez-vous perdu le contact?
Non, répond la tour de contrôle.
L'objet semble être du côté du Bourget.
En effet, le pilote, en se tournant de ce côté, aperçoit de nouveau non seulement la mystérieuse lumière clignotante, mais bien l'objet lui-même, énorme et noir sur le fond du ciel.
Ce manège dura en consécutives. Au dire des enquêteurs de l'aviation civile, les pilotes des divers appareils qui atterrirent cette nuit-là à Orly après avoir vu la lumière clignotante, et parfois l'objet, man?uvrer autour d'eux à des vitesses folles, étaient blêmes de peur. Mais ce n'est pas tout :
- Avez-vous la même réception que nous ?
Aussitôt, le radar d'Orly fut brouillé par une puissante interférence. Pour échapper au brouillage, les opérateurs d'Orly changèrent de fréquence. Plus de brouillage pendant quelques secondes, au cours desquelles l'objet redevint parfaitement visible sur l'écran. Après quoi le brouillage reprit sur la nouvelle fréquence : tout se passait comme si l'objet, ayant intercepté et compris la conversation entre Orly et Le Bourget, avait jugé importun le repérage radar et l'avait brouillé, et ceci de fréquence en fréquence, car radar et brouillage ne cessèrent à partir de ce moment de se poursuivre! Cette interprétation, il faut le souligner, je la tiens des techniciens de l'aéronautique qui enquêtèrent ensuite sur l'incident. Détail : le radar du Bourget, en dérangement, ne fonctionnait pas cette nuit-là.
Ainsi, dans ce cas particulier, l'observation radar fut doublée non seulement de l'observation optique, visuelle, par les pilotes qui aperçurent l'objet en vol, mais par tout un manège chat et souris évoquant irrésistiblement une activité intelligente.
Quelques années plus tard, je reçus à Paris la visite d'un des membres les plus éminents de la Commission d'Enquête de l'U.S. Air Force venu consulter mes dossiers et échanger avec moi ses impressions. Interrogé sur ce qu'il pensait du cas d'Orly, il poussa un soupir désabusé :
- Des cas de cette sorte, nous en avons tous les mois aux États-Unis.
- Et vous les expliquez ?
- Les expliquer ? Comment les expliquerions-nous? C'est parfaitement inexplicable.
- Mais alors, pourquoi diable publiez-vous périodiquement des communiqués affirmant que 99,5 % des cas qui
vous ont été soumis ont reçu une explication satisfaisante, et que les autres n'ont aucune importance?
Nouveau soupir désabusé :
- Pourquoi? Pour avoir la paix. N'oubliez pas que la commission américaine est une commission militaire.
Ah! si l'U.S. Air Force confiait cette tâche à des hommes de science...
Tous les mois
, disait cet honnête homme.
Certes, les cas que l'U.S. Air Force a laissé publier ne sont ni les plus nombreux ni les meilleurs. Mais nous disposons quand même de quelques sources américaines suffisamment édifiantes.
D'abord, le rapport du capitaine Ruppelt, déjà cité. Nous y voyons que le cas type, maintes fois répété avec quelques variantes, est le suivant : un radar repère, en plein jour, un objet volant à des vitesses nettement aberrantes, par exemple, le sur-place, ou des milliers de km/h. Les opérateurs du radar mettent le nez dehors et voient l'objet, rond, en forme de soucoupe renversée, argenté, brillant au Soleil. Ils appellent un autre radar, qui le repère aussi. Ils alertent une base militaire, qui fait prendre l'air à un chasseur. Le chasseur approche, voit l'objet, le décrit par radio, et le prend en chasse. L'objet le laisse approcher, puis s'éloigne plus vite qu'aucun avion de chasse. Le pilote décrit la man?uvre, laquelle est suivie par les autres radars. Objet et chasseur s'éloignent rapidement, arrivent dans le champ d'un troisième radar qui se met à observer la scène à son tour. Le chasseur épuise son carburant, vire et rentre à sa base. L'objet s'arrête et revient là où il était, jusqu'à l'arrivée d'un autre chasseur, et le petit jeu recommence.
- Quoi! tout cela se serait réellement passé et l'on n'en saurait rien?
Non seulement tout cela s'est réellement passé une fois, mais c'est justement la le type d'observation dont mon interlocuteur disait que l'U.S. Air Force en avait tous les mois de semblables sur les bras. Voyez le rapport de Ruppelt, édité en livre de poche par Ace Books, à New York. Il y a, je l'ai dit, des variantes. Parfois, c'est un simple citoyen qui déclenche tout en appelant une base militaire au téléphone. Parfois, c'est un pilote qui appelle une tour de contrôle. Mais c'est là, peut-on dire, du tout-venant.
Chaque fois que j'expose ce que l'on vient de lire, la réaction est la même :
- Mais enfin, vous rêvez ! C'est impossible! Cela se saurait !
Cela se sait, précisément. Mais il faut, pour en acquérir la preuve, avoir envie de se renseigner,
c'est-à-dire, d'abord, de déverrouiller le blocage mental provoqué de façon quasi automatique dans l'esprit de
tout contemporain par l'expression soucoupe volante
. J'ai cité Ruppelt. Mais
il y a mieux encore en fait de source. Et l'on n'a que le choix. Voici un rapport officiel publié
en
par l'administration de l'Aéronautique civile américaine. C'est une étude
consacrée aux observations-radar enregistrées sur la seule base de Washington pendant une brève période de 12
semaines, du le , période d'ailleurs quelconque. Le tableau des pages 2 et 3 de
ce rapport relève 19 contacts radar. 4 de ces contacts sont doubles, c'est-à-dire que, dans 4 cas, l'objet a été
repéré simultanément par 2 radars différents. Dans 16 cas, l'objet a été vu. Dans 3 cas, il était
bleuâtre. Dans un autre cas, il était rouge. Le le , c'était un objet orange.
le , c'est un objet sombre, sans luminosité, qui fut aperçu. Le le , un objet blanc. Et ainsi de suite.
Les altitudes varient de 300 m, le , à 17000 m, le . Les vitesses repérées varient du surplace le à 1800 km/h le . Un autre jour, la vitesse, non indiquée, est qualifiée de fantastique (tremendous).
Veut-on d'autres détails ? Le le , l'objet était de forme oblongue. Le en , c'était un petit objet circulaire, sombre, à la tranche parfois visible. Aucun bruit. Il se déplaçait vers le nord-est à faible vitesse en oscillant et en ondulant. Les nuages allaient en sens inverse. Il a disparu en entrant dans un nuage.
Si maintenant on étudie le tableau d'un peu plus près, on se rend compte que plusieurs de ces "contacts" concernent le même objet, qui a été vu et cueilli au radar en plusieurs endroits successivement dans des évolutions variées. Le le , par exemple, les observations se succèdent de 19:30 (vitesse faible, disparition dans un nuage) jusqu'à 00:30 (contact radar et visuel). A 2 reprises, il y eut 2 objets volant de conserve et 7 observations se succèdent ce jour-là en quelques heures.
C'est au cours de l'une d'elles que fut notée la vitesse "fantastique". Cette question de vitesse est très importante. La 2nde partie du rapport est en effet une étude des échos radar provoqués par les inversions de température, et la conclusion de nos 2 auteurs est que la vitesse attribuée à l'objet fictif résultant de tels échos ne peut être en aucun cas supérieure au double de la vitesse du vent à l'altitude de l'inversion.
De ce fait, l'explication par le mirage, la seule possible, se trouve exclue, sauf dans une observation du 13 août n'ayant d'ailleurs reçu aucune confirmation visuelle.
La "rumeur" des soucoupes volantes, comme dit Jung, est née, on s'en souvient, aux États-Unis au début de l'été en . Pendant plusieurs années la lecture des journaux put donner à croire qu'il s'agissait d'un phénomène strictement américain.
Détail curieux et bien oublié maintenant, la première interprétation du public et de quelques techniciens qui s'y intéressaient ne fut nullement celle d'engins d'origine extra-terrestre: l'opinion unanime fut d'abord qu'il s'agissait d'une arme secrète américaine ou russe. L'hypothèse extraterrestre ne commença à prendre corps qu'à la suite des démentis de Washington et de Moscou, fréquemment réitérés en et en .
Il est encore question de la théorie de l'arme secrète dans mon 1er livre n1[Lueurs sur les soucoupes volantes], paru en . Je l'écartais d'ailleurs, car les conversations que j'avais eues en 1953 avec des officiers de la Sécurité de l'armée de l'air avaient fini par me convaincre de l'inexistence du secret militaire, fût-ce dans la Russie stalinienne.
Mais dès l'instant que l'origine extra-terrestre était envisagée, une question s'imposait qui était aussi une objection : si des êtres intelligents originaires d'une planète lointaine se donnaient la peine de venir jusqu'ici, pourquoi n'atterrissaient-ils pas ? Il me parut toutefois que cette façon de poser le problème ressortissait à la pure spéculation et qu'une recherche objective n'avait pas à en tenir compte. La véritable question était une question de fait : ces engins existent-ils, oui ou non, tout le reste relevant de la psychologie intersidérale, je veux dire de la science-fiction.
Sur ces entrefaites, survint la fameuse vague d'observations de l'automne en . Pendant 5 semaines environ, de la mi-en , les journaux européens jusque-là pratiquement muets sur la question se mirent à publier chaque jour des dizaines et des dizaines de récits de témoins. En Italie, en Angleterre, en Suisse, en Belgique, dans la péninsule Ibérique et naturellement en France, il ne fut pendant cette brève période question que de cela. Quelques flatteurs affirmèrent alors que la source de cette vague devait être cherchée dans mon livre, paru le printemps précédent. Hélas ! mon livre était un four. On ne commença à le lire (peu) qu'après la fin de la vague. Et les innombrables témoins que j'interrogerai ignoraient jusqu'à mon existence, je dis en France, et à plus forte raison, à l'étranger.
La vague passée, quelques amis et moi travaillâmes des mois durant à réunir tous les documents et à faire remplir des questionnaires.
Vers en , je me trouvai ainsi à la tête d'une documentation énorme, chaotique et parfaitement
délirante, dont il était impossible de tirer la moindre conclusion. Tout avait été "vu" en
en . Des objets en l'air, des échos radar, des objets en formation, des objets au sol, et
même leurs pilotes ! En cent endroits, des moteurs d'auto ou de camions avaient été stoppés lors du passage en
rase-mottes d'une soucoupe
, des phénomènes électriques d'induction observés, de la terre arrachée au sol par
un engin prenant l'air brutalement
. II y avait des traces au sol, des rémanences magnétiques faisant dévier
la boussole, des témoignages concordants d'observateurs éloignés les uns des autres et ne se connaissant pas. On
pouvait même souvent, par exemple le , suivre un engin
à la trace à travers la
France, de témoignage en témoignage. Mais, d'un autre côté, le tout présentait un aspect si délibérément démentiel
que même les chercheurs les plus blasés penchaient à donner raison au professeur Heuyer, auteur d'une
retentissante communication à l'Académie de Médecine sur l'origine psychopathologique de la psychose soucoupique.
Je fis moi-même plusieurs conférences dans ce sens.
Une question pourtant nous intriguait, le petit groupe d'amis et moi qui, ayant tué père et mère, nous obstinions à chercher un fil dans ce labyrinthe : où diable se cachaient les victimes de cette psychose supposée ? Car le public, je ne dis pas dans sa majorité, mais bien dans son unanimité, y compris la presque totalité des témoins, refusaient de croire aux soucoupes volantes.
- Je ne sais pas ce que vous racontent vos cinglés
, me disait par exemple un mécanicien dont la voiture
avait été stoppée, moteur bloqué et phares éteints, sur une petite route près de Dammartin-en-Goële, et, pour
moi, je ne marche pas dans ces histoires à dormir debout.
En pleine période de vague, c'est-à-dire au moment où la psychose aurait du être à son comble, je fus invité à prendre la parole dans le plus grand théâtre de Lille. Cette conférence avait été préparée de main de maître par ses organisateurs : affiches énormes sur les murs de la ville, interviews à la radio, articles de presse. Je suppose que mes hôtes escomptaient de somptueux bénéfices de leur opération.
L'avouerai-je ? quand le rideau se leva devant moi et que 30 ou 35 personnes au plus se laissèrent apercevoir dans le désert de l'immense salle, je poussais un soupir de soulagement.
Mais la vague n'en était pas moins réelle en tant que rumeur, et il fallait en trouver l'explication.
-Si ce que racontent ces gens est vrai, me dit un jour Jean Cocteau, si ces engins existent et si on les a vus, il est inconcevable qu'un ordre quelconque ne se cache pas sous ce désordre. C'est cela qu'il faut chercher : l'ordre caché sous le désordre.
Et, en effet, le désordre d'une bataille cache les plans d'un état-major. Le tas de pierres peut être la ruine d'un temple.
Il y avait bien quelque chose derrière le chaos de en , et ce quelque chose commença à m'apparaître en .
Si l'on porte sur une carte de l'Europe tous les points où des soucoupes volantes ont été observées pendant l'automne en , on obtient ce que les mathématiciens appellent une répartition aléatoire. L'impact des plombs d'une cartouche sur une cible, celui des gouttes de pluie sur un trottoir, la position des arbres dans une forêt sont des répartitions aléatoires : c'est le désordre du hasard.
Mais au lieu de porter sur la carte toutes les observations de la vague, bornons-nous aux observations d'un seul jour, le , ou le , ou le ou n'importe quel autre. Alors, dès le premier coup d'?il, quelque chose se laisse reconnaître. Le 15 octobre par exemple, il y eut 8 observations : à Southend en Angleterre, 1 à Calais, une à Aire-sur-la-Lys, 1 sur la Nationale 68 entre Niffer et Kembs (frontière franco-allemande), 1 à l'embouchure du Pô, 1 à l'est de Paris, 1 sur la Nationale 7 au sud de Montargis, 1 enfin à Fouesnant, près de Quimper.
Si l'on joint l'observation italienne à celle de la Nationale 68, cette ligne droite embroche très exactement, à 400 km de là, l'observation d'Aire-sur-la-Lys, puis celle de Calais, puis celle de Southend. Longueur de la ligne : 1100 km. 5 observations se trouvent rigoureusement alignées sur cette longue distance.
De plus, la droite Nationale 68 - Montargis aboutit à Fouesnant, et la droite Montargis-Calais passe par Paris. Hasard? Soit.
Prenons un autre jour, le . 9 observations ce jour-là. Sur les 9, 6 se trouvent sur une même droite allant de Bayonne à Vichy. 2 des 3 autres sont alignées avec une observation du précédent alignement.
La dernière est en dehors de tout alignement.
Ne retenons que ]a première de ces lignes, la droite Bayonne-Vichy à laquelle nous avons donné le nom de code de Bavic, car elle a fait couler beaucoup d'encre dans le monde entier depuis 1954 et constitue probablement une des clés du problème Soucoupe.
Compte tenu de la précision des points d'observation, l'Américain Lex Mebane a pu établir que la probabilité pour que, sur 9 points donnés au hasard sur une surface, 6 se trouvent sur une même droite, cette probabilité devrait être chiffrée à 1 contre 500 000 au moins, et peut-être à 1 contre 40 000 000. Autrement dit il y a certainement 500 000 à parier contre 1, et probablement 40 000 000 contre 1, que la disposition des observations du le n'est pas aléatoire, qu'elle correspond à un ordre.
Ce n'est pas tout. 1 an environ après la parution du livre où j'exposais ces faits étranges, Jacques Bergier me signala une observation de ce même 24 septembre 1954 et qui m'avait échappé. Elle était signalée dans un numéro du Parisien Libéré de la fin du mois et reprise de la presse portugaise. Ce même 24 septembre, donc, il y avait eu au Portugal une 10ème observation: une "soucoupe" vue par un paysan près d'un petit village de la sierra de Gardunha, non loin de la frontière espagnole. Quand je pointai ce lieu d'observation sur la carte, j'eus la stupeur de constater qu'il se situait très exactement sur le prolongement de "Bavic", vers le sud-ouest.
J'aurais pu, avec plus de confiance, retrouver l'observation du paysan portugais en me contentant de prolonger ma ligne droite de quelques 600 km vers l'Atlantique ! "Bavic" ne comptait donc pas 6 observations sur 9, mais bien 7 sur 10, et la probabilité pour que le hasard seul en fût cause devenait pratiquement nulle.
A peu près vers la même époque, et à force de comparer les cartes d'alignements de l'automne en , une remarque s'imposa à moi avec une force croissante : tous ces alignements ne semblaient pas de même nature. Le le , par exemple, ils formaient sur la France une sorte de réseau géométrique. Le le et le , par contre, le réseau se réduisait à 1 ou 2 lignes, mais très longues, franchissant les frontières, invitant invinciblement l'imagination à sortir des limites de l'épure. Or, tandis que je réfléchissais à la signification possible de cette différence, une nuit, coup sur coup, deux observations me furent signalées à Tulle et à Brive. Ces observations se situaient encore sur "BAVIC". Mais cette fois, plus de 2 ans s'étaient écoulés depuis la vague de en . Coïncidence ? Ou indice d'une piste nouvelle ?
Je repris mes dossiers et constatai que pendant la seule vague de 1954, un bon nombre d'autres observations se situaient également sur "Bavic".
Parfois même - par exemple à Dôle, dans le Jura - on notait sur cette ligne plusieurs retours à des dates différentes. D'où la question: certaines lignes ne seraient-elles pas permanentes? N'ordonneraient-elles pas de façon chronique le phénomène soucoupe dans son ensemble ? Pour obtenir une réponse significative à cette question, il fallait d'abord amasser une documentation suffisante sur le phénomène à l'échelle mondiale. Je disposais d'un certain nombre de revues spécialisées anglaises et américaines, ainsi que d'un réseau non négligeable de correspondants étrangers. Depuis les événements de 1954, 5 autres vagues d'observations s'étaient succédé dans le monde, toutes plus ou moins semblables à la vague européenne : 1 aux Etats-Unis, 1 dans les provinces septentrionales du Brésil et au Venezuela, 1 en République Argentine, 1 en Nouvelle-Zélande et 1 en NouvelleGuinée orientale. Les surfaces où ces vagues s'étaient développées présentaient généralement une extension assez restreinte. La plus vaste, aux Etats-Unis, semblait concentrée sur les Etats du nord-est, dans la région des Grands Lacs. Sur une mappemonde, elles se présentaient sous la forme de taches assez bien délimitées.
Je pris donc la ligne européenne la plus suggestive et la plus riche, qui était précisément "Bavic", et, en faisant l'hypothèse que cette ligne apparemment droite était un grand cercle terrestre, je demandai à un ami disposant du matériel nécessaire à l'opération de calculer ce grand cercle avec la plus grande précision possible (on peut le calculer "à la main" , mais c'est une opération longue et laborieuse).
Le résultat, je dois le dire, nous stupéfia. Qu'on en juge : le grand cercle déterminé par l'alignement Bayonne-Vichy survole successivement le Portugal, les Provinces septentrionales du Brésil, la République Argentine, la Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Guinée orientale, Formose et le continent Eurasiatique. Sur six des vagues survenues depuis en , inclusivement, cinq sont donc embrochées par cet énigmatique grand cercle découvert à la seule lumière des observations françaises de en ! Au moment où nous faisions cette découverte, nous avions parmi nous à Paris M. Christian Vogt, le très compétent animateur de la Commission d'Enquête CODOVNI, de Buenos Aires. II partagea notre étonnement et notre enthousiasme. Pour la première fois. un début d'ordre se laissait deviner à l'échelle planétaire dans ce phénomène condamné. II y avait donc un espoir d'en venir à bout avec les moyens traditionnels de la recherche scientifique.
La vague américaine de l'automne 1957 restait seule en dehors de la ligne : mais elle coïncidait dans le temps avec le lancement du premier Spoutnik, et pouvait s'interpréter autrement.
Le fait expérimental des alignements, que chacun peut contrôler à partir des sources données dans mon livre et à l'aide de cartes, comporte un ensemble d'enseignements qu'il faut maintenant souligner:
grand cigare des nuéesen raison des nuées tourbillonnantes qui l'entourent constamment, a été observé partout dans le monde, par des paysans de la Seine-et-Marne et par des Tasmaniens, au-dessus de Los Angeles et au Venezuela. On sait que Paul Thomas en a donné une intéressante interprétation historique dans son livre Les Extra-terrestres.
Un bilan élémentaire du "problème soucoupe" tel qu'il se présente en devrait encore mentionner les études statistiques de fréquence faites en France, au Brésil, en Espagne et aux Etats-Unis, ainsi que l'analyse fine de l'alignement "Bavic", à la suite de la saisissante série d'observations enregistrées pendant l'été en dans le centre de la France. Je n'en dirai que quelques mots, car il faudrait un livre pour en parler convenablement.
Sur le premier point (rythme des fréquences), les faits sont les suivants : en se fondant sur quatre catalogues différents n'ayant de commun entre eux qu'un stock minoritaire d'observations, 4 chercheurs travaillant séparément et sans s'être concertés ont abouti au résultat identique d'une maximum très net tous les 26 mois. On voit ce qu'évoque ce cycle: c'est celui des oppositions de la planète Mars. "Elles" viendraient donc de Mars ? Conclusion simpliste. D'abord, les maximums ne coïncident nullement avec les rapprochements de la planète, mais avec le 3ᵉ mois suivant l'opposition. Ensuite, le Dr Olavo T. Fontès, un chercheur brésilien, croit avoir décelé, se superposant au cycle de 26 mois, un second cycle, plus long, de 5 ans. Mars joue indiscutablement un rôle dans l'organisation chronologique du phénomène. Lequel? On en discute.
Sur le second point (structure fine des alignements), les recherches actuelles sont beaucoup plus prometteuses.
Il n'est pas déraisonnable en effet, compte tenu de ce que l'on sait déjà, d'espérer que l'on pourra un jour prévoir certaines observations et dire, par exemple, à l'issue d'un calcul, que tel jour, à telle heure et à tel endroit, il se passera ceci ou cela. Cet espoir se fonde sur quelques très encourageantes réussites dont voici la plus remarquable.
vers le (c'est-à-dire en plein jour), 4 objets étaient observés coup sur coup à faible distance au-dessus d'un hameau du Puy-de-Dôme appelé Le Vauriat. Il y avait plusieurs témoins, dont un pilote expérimenté, membre de l'Aéro-Club d'Auvergne.
Le journal de Clermont-Ferrand "la Montagne", par qui nous fûmes alertés, donnait dans son numéro du 30 août de nombreuses et intéressantes précisions, car les objets, descendus à basse altitude, avaient manœuvré pendant plusieurs minutes sous les yeux des témoins. Mais la précision la plus précieuse pour nous manquait : on ne disait pas où se trouvait Le Vauriat. Un de mes amis (que je ne nommerai pas parce qu'il appartient au Centre national de la Recherche scientifique) entreprit de repérer ce lieudit sur la carte du Puy-de-Dôme au 200000ème, tâche fastidieuse et sans espoir : cette carte mesure 1,10 m de long sur 50 cm de large et comporte des milliers de noms (c'est la Michelin n° 73). Après avoir vainement cherché pendant une heure ou deux, il eut soudain une idée : l'alignement "Bavic" ne traverserait-il pas le Puy-de-Dôme ? Si, précisément, si donc l'observation était authentique, il y avait une bonne chance pour que Le Vauriat se trouvât sur cet alignement, car la manœuvre décrite était celle d'une intersection de lignes.
II porta donc sur la carte les coordonnées de "Bavic" qu'il traça avec beaucoup de soin, et se reporta au récit des témoins.
Les 4 objets
, pouvait-on lire dans la Montagne, se mirent alors à décrire une sorte de ballet
au-dessus de la gare...
La gare ! Il y avait donc une voie de chemin de fer ! Notre ami mit le doigt sur une extrémité de la ligne et la suivit jusqu'à ce qu'elle coupât une voie. À ce point précis, "Bavic" traversait un tout petit village. Notre ami se pencha et lut : le Vauriat. Il m'appela aussitôt au téléphone et, je dois le dire, sa voix tremblait.
On comprendra que le jour où nous en saurons autant sur les chronologies du phénomène que nous en savons déjà sur ses lois spatiales, ou, si l'on préfère, topographiques, la prévision deviendra possible. Mais ce résultat, s'il peut être atteint, ne le sera qu'au prix d'une étude minutieuse et de beaucoup de travail. C'est dans ce but qu'un certain nombre de chercheurs français - astronomes professionnels, techniciens de l'aéronautique, physiciens, ingénieurs - ont décidé vers la fin de en de se constituer en groupe d'étude n2[Le Groupe d'Etude des Phénomènes Aériens et des Objets Spatiaux Insolites, 74, rue Etienne-Dollet, Cachan (Seine)]. Forts d'une expérience classique dans l'histoire des sciences et qui veut que les recherches nouvelles ne soient poursuivies qu'au prix des plus graves risques professionnels, ces chercheurs garderont l'anonymat. Ils savent trop ce que seraient les réactions des maîtres administratifs de l' astronomie et de la recherche spatiale française à leur égard pour risquer l'avenir de leurs travaux en les divulguant sous leur nom. De quoi s'agit-il en effet ? De proclamer urbi et orbi que tel ou tel savant français travaille sur les soucoupes volantes, ou de faire progresser la connaissance ? Tous les travaux effectués en France sur ce sujet condamné seront donc publiés sans nom d'auteur n3[Dans le bulletin du GEPA], et, s'il le faut, hautement récusés et abjurés. La formule d'abjuration est toute prête.
Planète l'a publiée dans son n° 8 : c'est l'abjuration de Galilée.
Moyennant quoi, et étant bien entendu qu'elles n'existent pas, on finira peut-être par savoir ce que sont les soucoupes volantes.
Aimé Michel.
Bibliographie :