le n1Daté rétrospectivement, un premier un homme du Hubei (55 ans) souffre d’une étrange maladie pulmonaire. Le le , ce sont 60 malades, plus ou moins liés au marché de gros de fruits de mer de Huanan à Wuhan, qui ont des symptômes semblables. La propagation de la maladie semble exponentielle s1Crouzet, Thierry : "Pourquoi le confinement était la seule stratégie possible", Blog, 2020-04-02.
Aï Fen (艾芬, la chef des urgences de l’Hôpital central de Wuhan) envoie des échantillons
prélevés sur ses patients (notamment une malade prise en charge par son hôpital le , et dont
l’état ne cesse de s’aggraver) à un laboratoire de Pékin. Le le ,
elle découvre le rapport du laboratoire, indiquant qu'il s'agit d'un un CoronaVirus ressemblant à un
SRAS
n2Il
sera nomenclaturé SARS-CoV-2 ou 2019-nCoV, pour le différencier du SARS-CoV-1 ayant provoqué une épidémie de
en ). Il se transmet principalement par les gouttelettes émanant des sécrétions
pulmonaires du patient et la pneumonie atypique qui en résulte est de manière évidente contagieuse
.
Fen comprend tout de suite que cette nouvelle est terrible
. Elle prend en photo les résultats d'analyse,
entoure la conclusion en rouge et poste l'image dans un groupe privé de son hôpital sur le réseau social WeChat
pour ses collègues, dont le docteur Li Wenliang (34 ans, ophtalmologue de 33 ans travaillant à l’hôpital), mais aussi
au département de contrôle des maladies infectieuses de l'hôpital. Elle brave ainsi l'ordre de Pékin qui lui a demandé
pourtant de se taire : S’il devait y avoir une panique, vous en seriez responsable
.
le , alors que 266 cas sont identifiés à l’hôpital de Wuhan n3En prenant un taux de 20% des cas nécessitant une hospitalisation, cela signifie environ 1000 cas dans la ville, Wenliang re-poste publiquement ce message, devenant ainsi le lanceur d’alerte. Il déclare via WeChat à un groupe de médecins que 7 cas d'une maladie ressemblant au SRAS sont liés à un marché de fruits de mer de Wuhan, origine présumée du virus.
le , Fen reçoit des témoignages étayant l'hypothèse que le virus vient du marché aux animaux et qu’il se transmet entre humains. Des politiciens décident de fermer le marché de Huanan.
le , Fen est convoquée par un directeur de l'inspection de l'hôpital qui l’accuse de répandre
des rumeurs
, de créer des problèmes
et de manquer à la discipline d’équipe
.
Fen répond alors docilement, disant être consciente d'avoir nui à la réputation de sa ville. Elle propose de
démissionner et d'être mise en prison. Au lieu de cela, on lui demande de reprendre le travail et de n’en parler à
personne, pas même à son mari, ce qu’elle va faire. À son mari, elle glissera juste : S’il m’arrive quelque
chose, occupe-toi bien des enfants
s3Pagès, David : "Mystérieuse disparition du docteur Ai Fen, celle qui a révélé
le coronavirus", Midi Libre, 2020-04-07.
le , alors que la revue scientifique Science évoque un nouveau virus, le commissariat de police local envoie une lettre d'avertissement à Wenliang lui demandant de faire cesser son trouble à l'ordre public par sa "fausse déclaration" :
Bureau de Sécurité publique de Wuhan - Sous-bureau de Wuchang - Commissariat de Police de la rue Zhong Nan Lu
Lettre d'avertissement
Nom : Li Wenliang
Sexe : Masculin
Date de naissance : 19861012
ID N° : 2305
Adresse :
Employeur : Hôpital Central de la ville de Wuhan
Acte illégal (date, lieu, participant, nombre de personnes, problèmes reflétés, conséquence, etc.) : 2019-12-30
A fait une fausse déclaration selon laquelle7 cas de SRAS ont été confirmés dans un marché de fruits de mer du Sud de la Chinesur le groupe WechatUniversité Clinique Niv. 4 de WuhanConformément à la loi, nous vous avertissons au sujet de la fausse déclaration que vous avez fait sur Internet. Votre comportement a gravement perturbé l'ordre social. Cela dépasse le cadre de la loi. Cela a violé la Loi du Peuple de la République de Chine et est passible d'amendes de Gestion de la Sécurité Publique. Il s'agit d'un acte illégal !
Nous espérons que vous coopérerez activement et nous écouterez. Arrêtez immédiatement votre acte illégal. Pouvez-vous faire cela ?R : Oui, je le peux.
Nous espérons que vous allez vous calmer et réfléchir sérieusement à ce que vous avez fait. Nous vous avertissons sollennellement : si vous persistez et réfusez de vous repentir, vous serez puni par la loi ! Est-ce clair ?
R : Oui.
Personne avertie : Date : 2020-01-03
Avertisseur : Employeur :
Wenliang signe la lettre.
7 autres médecins sont interpellés dont Fen, sévèrement réprimandée après avoir prévenu sa hiérarchie. On lui
demande de ne parler à personne du virus, même pas à son mari. J'avais l’impression que, à moi toute seule,
j'avais ruiné l’avenir de Wuhan. J'étais désespérée.
dira-t -elle.
le , la Chine change de stratégie pour jouer la transparence. 2 premières morts liées au virus sont officiellement admises, et le virus est identifié : il est séquencé et son génome définitif est publié le .
le , le gouvernement chinois envoie un message d’information aux agences de santé.
le , le Parti Communiste organise un banquet monstre à Wuhan avec 40000 invités, dont certains portent déjà des masques et montrent des signes de maladie.
le , les autorités chinoises reconnaissent officiellement la possibilité d'une contagion d’homme à homme. L'OMS craint une propagation internationale.
le , le gouvernement chinois place en quarantaine Wuhan, Huanggang et Ezhou. Les transports publics sont fermés ainsi que les lieux publics, provoquant un véritable exode, estimé à 5 millions de personnes. Officiellement, l’épidémie a causé 17 victimes dans ces villes peuplées par 20 millions d’habitants.
le , Xi Jinping (président chinois) reconnaît la gravité de situation : 56 morts, 1870 cas identifiés. Il étend la quarantaine aux 56 millions d’habitants de la province de Hubei. Etant donné qu'il devait y avoir au moins 1000 cas fin en , des scientifiques pensent que ce chiffre est largement sous-estimé, estimant que la Chine doit avoir 100000 cas. Cependant, personne ne panique encore, et la Covid 19 est toujours décrit comme une sorte de grippe.
le , la Chine annonce 490 victimes pour 19383 cas et demande à la communauté internationale des masques dont elle manque cruellement.
le , Wenliang poste sur Weibo :
Salut tout le monde, c'est Li Wenliang, an ophtamologue de l'Hôpital Central de Wuhan. Le 30 décembre, j'ai vu un rapport d'analyse d'une patiente qui détectait avec un haut degré de confiance un indicateur positif d'un coronavirus SRAS. Afin de rappeler aux étudiants de faire attention à se protéger, mes collègues de classe sont aussi cliniciens, donc ça a été diffusé dans le groupe. La source indiquait que
7 cas de SRAS ont été confirmés. After que la nouvelle ait été donnée, le 3 janvier, le Bureau de Sécurité Publique m'a trouvé et signé une déclaration d'avertissement. Depuis, j'ai pu travailler normalement. Après avoir reçu des patients avec une pneumonie dûe au nouveau coronavirus, j'ai commencé à avoir des symptômes de toux le 10 janvier, de la fièvre le 11, et ai été hospitalisé le 12. À ce moment, je pensais toujours (...)
le , jour de la visite surprise du président Xi Jinping à Wuhan, le magazine Ren Wu (Les Gens), filiale du groupe du Quotidien du peuple (organe de presse officiel du Comité central du Parti communiste chinois), publie une interview de Fen. Parmi ses propos chocs :
Si mes collègues avaient été prévenus plus tôt, ils ne seraient pas morts (...) Si j’avais su comment l’épidémie allait évoluer, je serais passée outre la réprimande ; j’en aurais parlé partout.
Très rapidement les éditions papier du journal sont saisies et le site internet est expurgé.
Début en , de premiers articles indiquent que Fen est introuvable depuis 2 semaines.
le , alors qu'elle ne déplore encore aucun mort, Hong Kong met en quarantaine les voyageurs venant du Hubei, ferme ses écoles, ses parcs.
le , la panique commence à s'emparer de Hong Kong qui connaît une pénurie de masques et de gel hydro-alcoolique. Toutefois, la culture de la prévention des infections y est bien ancrée et les gens portent des masques, respectent les mesures de distanciation sociale, et les rues sont quasi désertes. La population s’est autoconfinée sans attendre de réaction du gouvernement, ce qui permettra de juguler la crise dans l’œuf, avant l’explosion exponentielle (4 victimes le ).